Tu as fait de moi ... une éducatrice

Publié le par Toutes en une

I

Toi l’Enfant qui n’es pas le mien,
Ni de près ni de loin,
Toi l’Enfant qui près de moi viens,
Chercher une attention, parfois un câlin.

Toi l’Enfant qui m’appelle,
Avant même de savoir parler,
Toi l’Enfant qui d’un regard,
Allume l’étincelle qui me fait exister.

Portez par ce regard ancré,
Par le touché,
Portez par le temps consacré,
Le lien se créé.

En harmonie, à l’unisson,
D’une même voie nous vivons,
Ces instants partagés au sein d’une collectivité.

Mais parfois,
C’est plus compliqué !

Le lien se tisse difficilement,
Avec toi, avec ton papa,
Ou encore avec ta maman,
Parfois ça prend plus de temps,
Tout simplement.

Aussi loin que je me souvienne,
Pour toi, l’Enfant, j’ai écrit,
Pour toi j’ai écouté, observé, appris la pédagogie,
Pour toi je me suis mobilisée, mais non sans peine,

Et je continuerai quoi qu’il advienne…

II

Toi l’Enfant,
Le plus beau trésor de tes parents,
Qui par choix ou pas,
Te confient à moi,
Jour après jour, mois après mois.

Toi l’Enfant,
Le plus beau trésor de la société,
Qui par choix financier,
Ne cesse de te sacrifier,
Jour après jour, année après année.

Tu es si précieux et pourtant,
Si peu considéré parfois,
Dans ta famille,
Dans ton école,
Dans ta ville,
Dans ton envol,
Je le constate avec effroi.

C’est le grand drame de notre société,
Qui n’a rien compris,
Au cycle de la vie,
Au pouvoir de l’empathie.

La responsabilité est grande, très grande !

Quand tu m’es confié le matin,
Je ne dois pas juste te maintenir en vie,
Ça c’est le minimum garanti.

T’ accueillir c’est bien plus que ça !

C’est accueillir la vie,
L’avenir, le passé et le combat,
C’est faire en sorte,
Que tu repartes chez toi,
Grandi, épanoui et serein.

C’est préserver et valoriser,
Ce qu’il y a de plus précieux dans ce monde.
C’est te permettre de développer,
Ce qu’il y a de plus précieux en toi,
La fragilité et l’innocence,
L’amour et l’intelligence.

C’est l’avenir à bercer et à choyer,
Dans l’espoir, secret,
De voir le monde changer.
C’est œuvrer pour un monde meilleur,
La paix entre les peuples et la paix à l’intérieur.

III

Alors, me direz vous,
Quelle chance j’ai, comparé à vous !
De vivre ce quotidien,
Fait de grandes étapes et de petits riens.

C’est une chance, certes,
Une joie immense, même,
Mais
Difficile et compliqué,
Quand des bâtons dans les roues,
On nous met.

C’est aller à contre courant,
De cette société capitaliste,
Pour qui un enfant coûte,
Mais ne rapporte rien.

Un enfant ne travaille pas.
Un enfant ne vote pas !

C’est entendre régulièrement :
« Amusez vous bien ! »,
Par ce qu’accueillir un jeune enfant,
Pour d’aucun,
Ça n’est pas très important !

Des professionnelles de la petite enfance ?
Mais pourquoi faire ?
Pas besoin d’un bac + 5 pour changer des couches !
On va leur mettre 2 ou 3 mères à la louche,
Ça devrait le faire !

IV

Comme ils ne comprennent rien,
Ni à toi, ni à moi,
Voilà quelques précisions,
Sur notre quotidien.

Te donner à boire et à manger,
Te coucher et te moucher le nez,
Certes, je le fais !

Ça, c’est le B A BA !

Mais t’accueillir, toi l’Enfant,
Ça va bien au-delà !

Te permettre de…

Trouver suffisamment d’espace,
Et d’occasion de bouger,
Courir, sauter, exercer ta motricité,
Ressentir ton corps et ton esprit,
Je le fais aussi !

Vivre en relation,
Avec l’autre,
Qu’il soit petit ou qu’il soit grand,
Un ami, une accueillant ou un parent,
En apprenant à dépasser les tensions,
Comme avec un hôte,
Je le fais aussi !

On en parle des émotions ?
Qui se bousculent, qui te bousculent, qui me bousculent…
Les accueillir, les reconnaître,
Leur permettre,
De s’exprimer dans de bonnes conditions,
Sans qu’elles s’accumulent,
Du sol au plafond,
Je le fais aussi !

Découvrir l’art et la culture,
La différence et le beau,
Te donner envie de créer, de t’exprimer,
Par ton corps et par tes mots,
Je le fais aussi !

T’ouvrir à la diversité du monde,
Des hommes et des idées,
Des couleurs de peau,
Des façons de parler,
Pour que ne cesse de croître en toi,
La tolérance et le respect,
Ton appétence naturelle pour l’empathie,
Je le fais aussi !

Te relier à la nature,
Sortir dans le jardin,
Observer les oiseaux,
Et autres petits animaux.
Sentir les éléments,
Observer les saisons,
Te relier à ta nature,
D’être vivant
Parmi les autres créatures,
Je le fais aussi !

Te connaître toi même,
De l’intérieur,
Tes besoins, tes envies, tes appétits,
Par le libre choix,
Les expérimentations à ta disposition,
Je le fais aussi !

Essayer, te tromper puis recommencer,
Apprendre de tes erreurs,
Et tranquillement y arriver,
De plus en plus,
De mieux en mieux,
Jusqu’à satisfaction !
Pour que grandisse en toi,
Confiance et estime de soi,
Je le fais aussi !

Et puis,

Être patiente et empathique,
Ferme parfois,
Active ou effacée
Tout dépend de toi.

Réfléchir,
Me poser des questions,
Me remettre en question,
Maîtriser mes propres émotions,
Pour être juste avec toi,
Dans mes gestes et dans mes mots,
Dans mes propositions,
Je le fais aussi !

Être là, réellement,
Dans les soins et dans la relation,
Nourrir ton corps et ton esprit,

Oui !

Mais aussi,
Penser, réfléchir, organiser,
L’espace et le temps,
Pour favoriser ton développement.

En ta présence,

Non !

En aval et en amont,
Sur des temps de réunion,
Pour que lorsque tu es là,
Tout soit prêt,
L’espace, le temps et moi.

V

« Un enfant seul n’existe pas »

Accueillir un jeune enfant,
C’est aussi accueillir son parent.
Tous les parents,
Sans distinction,
Les prendre comme ils sont,
Parfois sympa, parfois pas,
Parfois reconnaissants, parfois non,
Parfois exigeants, parfois pas assez,
Bref, il faut composer !

Qu’ils viennent d’ici ou d’ailleurs,
Qu’ils me ressemblent ou pas,
Que je les comprennent ou pas,
Que l’on ai ou pas fait les même choix,
Avec les parents, c’est comme avec les enfants,
Même ligne, même combat,
Révéler le meilleur de chacun,
Et les respecter tous,
Offrir le meilleur de soi,
Et les écouter tous.

« Il faut tout un village pour élever un enfant »

Accueillir un jeune enfant,
C’est aussi travailler en équipe,
Avec des collègues de formations diverses,
Parfois même sans,
Avec les responsables et les élus,
Avec les intérêts de chacun,
Parfois très divergents,
Pour certains, les chiffres, la quantité,
Pour d’autres, le vécu, la qualité !

Avec tous ces paramètres,
Il faut élaborer,
Les plannings et les projets,
Élaborer le jour, élaborer la nuit,
Parce qu’il ne faut pas croire,
Que lorsqu’on rentre chez soi,
Tout s’arrête comme ça,
Comme par magie.

Accueillir des jeunes enfants,
C’est là tout le temps,
Au creux de son cœur et de son esprit,
« Mais comme il va mal celui ci »,
« J’ai pas de budget pour cela, j’ai pas de temps pour ceci »,
« J’ai pas le personnel pour cela, les mètres carrés pour ceux ci ».

VI

Accueillir des jeunes enfants,
C’est comme un tourbillon,
De sourires et de joie,
De pleurs et de colère,
De mouvements et de soulagement,
De calme et de tensions,
De réflexion et d’actions,
De lumière et d’obscurité,
D’humains et de comptabilité,
D’enfants et d’adultes,
De portes à réparer, de couches à commander,
D’émotions à consoler,
De fleurs à humer, de jeux à ranger,
De dossiers à remplir et envoyer,
De chansons à chanter et de rondes à danser…

De médocs à donner parfois,
Sans être sûr d’en avoir le droit,
Mais tout le monde s’en fou,
Y’a pas de loi pour ça,
Ce ne sont que des bébés,
Et des femmes pour s’en occuper,
On va quand même pas perdre notre temps,
Au gouvernement avec ces futilités !

Accueillir des jeunes enfants,
C’est comme un tourbillon.

Oui !

« Le tourbillon de la vie ! »

C’est pas un monde à part,
C’est notre monde à nous.

Celui d’aujourd’hui et celui de demain.

Nous avons tous un rôle à jouer !

Prévenir plutôt que réparer,
Soutenir plutôt que blâmer.

Alors s’il vous plaît,
Pour l’Enfant,
Pour l’Humanité,
Pour la Vie,
En route, merci !

Il est temps de se réveiller !
De se mobiliser !
D’y aller !

Demain il sera trop tard,
Nous n’aurons plus que nos yeux pour pleurer.

Publié dans Capaulie écrit, Hélix

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